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Réfugiés et autochtones dans le Lac tous faces aux mêmes défis.

9 juillet 2018
Temps de lecture : 7 minutes

Nous voulions avoir le point sur la situation des réfugiés dans la région du Lac Tchad. Mr Edouard O’Dwyer a daigné accorder un entretien à notre station. Et c’est Mahamat Ali Mouta qui est allé à sa rencontre.

Mahamat Ali Mouta : Mr Edouard O’Dwyer bonjour, pouvez-vous nous dire la situation des  réfugiés en général au Tchad?

Edouard O’Dwyer : Au Tchad aujourd’hui nous avons 450. 579 réfugiés enregistrés avec le gouvernement. La plupart de ces réfugiés sont des Soudanais, nous avons plus que 100.000 réfugiés Centrafricains, nous avons près de 10.000 réfugiés Nigérians avec plusieurs autres réfugiés de nationalités mélangées ici à N’Djamena.

MAM : Est-ce que la courbe des réfugiés est en hausse perpétuelle ou baisse-t-elle ?

EOD : Oui depuis le mois de décembre 2017, nous avons enregistré 27.555 réfugiés centrafricains nouveaux arrivés qui sont arrivés au sud du pays, qui ont fui les conflits et l’insécurité en république centrafricaine pour se réfugier ici au Tchad.

MAM : Quelle est la situation des réfugiés qui se trouvent dans le Lac Tchad ?

EOD : Voilà dans le Lac Tchad nous avons des réfugiés Nigérians qui sont installés dans cette région depuis bientôt quelques années. Ils ont fui l’insécurité liée à Boko Haram dans le Bassin du Lac Tchad. Et aujourd’hui nous avons enregistré exactement 9.859 personnes dont 3.175 ménages et parmi eux il y a 7.229 qui vivent dans le camp de Dar-es-Salaam près de Bagasola. Les autres vivent dans des villages et des zones souvent non accessibles dans les zones de Kangalam, Ngouba et Kaga kinji-riya. Il reste aujourd’hui 5.500 qui ne sont toujours pas enregistrés. Et donc ce qu’on cherche dans la mesure du possible, et aussitôt que possible d’enregistrer ces réfugiés. Et la  raison pour laquelle on n’a pas encore fait cela, c’est parce que c’est lié à ce défi d’insécurité qui règne dans certaines parties du Lac ou il y a des risques de rencontres avec Boko Haram.

Maintenant nous sommes dans les pourparlers, dans la collaboration avec les autorités pour monter des missions ponctuelles pour aller enregistrer ces réfugiés et naviguer sur le Lac parc qu’il y a des défis de navigation aussi sur le Lac. On espère que d’ici peu, si les conditions nous permettent d’enregistrer ces gens.

MAM : Et quid de la situation dans la région du Lac Tchad ?

EOD : La situation dans la région du Lac est quand même calme. Elle s’est beaucoup améliorée depuis  les années 2015 il faut le dire. Et aussi avec ces opérations menées par la Force mixte multinationale et une forte implication de l’Etat du Tchad et son armée pour rétablir la paix totale dans la région du Lac Tchad, les choses vont dans la bonne direction bien sûr. Cela n’empêche pas de dire qu’il y a toujours des poches d’insécurité et il  nous faut être extrêmement prudent de ne pas provoquer des « Do no harm ». Dans nos activités et nos stratégies on avance prudemment, mais on avance.

MAM : Quelles sont les défis à relever ?

EOD : Les défis à relever concernent les réfugiés, mais aussi la communauté hôte. Parce qu’il faut renforcer cette idée, les réfugiés vivent dans des communautés. Bien qu’ils se trouvent actuellement dans les camps, on est entré dans une dynamique ici avec le gouvernement du Tchad, que les réfugiés doivent vivre dans des communautés avec leurs voisins Tchadiens. Et donc c’est un brassage de populations pour permettre à tout le monde de vivre en sécurité avec les moyens d’existence qu’il faut, avec l’accès aux services. Et pour le moment un des grands défis c’est l’autonomisation des réfugiés, mais aussi l’autonomisation des populations du Lac. Parce que les populations du Lac ne sont pas des populations énormes. Tout le monde au Lac est confronté aux mêmes contraintes quotidiennement. On essaie d’avoir une approche qui englobe et les réfugiés, et les populations hôtes. Mais pour être plus précis, il y a un défi d’accès à la terre pour promouvoir l’agriculture et les moyens d’existence. C’est dans une zone assez désertique du Lac ou il y a un accès à la terre limité parce que c’est le sable. Il faut faire un plaidoyer avec les autorités administratives et traditionnelles, mais aussi les personnes privées pour arriver à une collaboration pour donner à ces réfugiés l’accès à la terre. Il faut aussi améliorer les moyens d’existence avec cette idée de « Polders » dans la région de Bagasola, on a identifié un endroit où on peut aménager 1.000 hectares de terres et on cherche actuellement un moyen de les mettre en place. On cherche avec les bailleurs avec la communauté internationale pour voir comment  réaliser ce projet. Il y a aussi le regroupement de pêches qui n’ont pas accès aux zones du Lac où se trouve le poisson. Dans ce cas c’est un défi, c’est lié à l’insécurité qui règne au Lac en ce moment. On travaille avec le gouverneur dans la région du Lac pour faire un plan de développement dans la région du Lac, que ce soit, la pèche, l’accès à la terre, mais que ce soit aussi le commerce.

MAM : La région du Lac est frontalière avec le Nigéria, le Niger et le Cameroun. Comment faire le commerce ?

EOD : Vous connaissez que la frontière avec le Nigéria est fermée. Le grand marché de Maiduguri, les gens ne peuvent pas accéder facilement. Les zones frontalières c’est toujours insécures avec cette présence de Boko Haram. Là il y a un dialogue transfrontalier avec nos collègues des nations unies et les autorités pour justement essayer de traverser et rouvrir ces frontières pour favoriser le commerce libre. Parce que pour le moment sont obligés de passer par le Niger pour accéder à Maiduguri. Ce qui n’est pas facile.

MAM : Quelle est la situation de l’éducation dans la région du Lac ?

EOD : L’éducation c’est l’avenir pour un pays. Aussi bien pour la région du Lac que pour le pays, la question liée à l’éducation constitue un réel défi que ce soit pour les réfugié que pour les tchadiens. Dans le camp de Dar-es-Salaam, nous avons une école des réfugiés et des autochtones. C’est pour l’école primaire. Nous n’avons pas de formation secondaire encore. Nous avons une école à Bagasola à 15 kilomètres ce qui n’est pas pratique pour beaucoup de gens. Avec les populations de Dar-es-Salaam et les réfugiés, il faut une école secondaire et on a déjà commencé avec une école du secondaire pour l’année à venir. Mais on a besoin d’au moins douze salles de classes. Il faut une école secondaire que ce soit dans le camp ou en dehors de Dar-es-Salaam C’est vraiment une priorité pour nous.

MAM : Votre action au Tchad est diversifiée.

EOD : Oui nous essayons de travailler avec le gouvernement tchadien pour faire retourner chez eux les réfugiés soudanais qui veulent bien retourner à la maison. Les centrafricains ne sont pas encore prêts. Mais pour ceux qui restent au Tchad en collaboration avec les autres partenaires, nous allons nous atteler pour améliorer la vie des réfugiés et de la communauté hôte.

MAM : Merci beaucoup Mr. Edouard O’Dwyer le Représentant Adjoint du Haut-commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés(HCR) au Tchad

EOD: Merci beaucoup cher Mahamat Ali Mouta.

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Ali